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CIMETIÈRE DE MONTMARTRE

FAMILLE SANSON

« La peine de mort présente à l’origine le double caractère d’un sacrifice expiatoire et d’un rite d’expulsion[1]. » Or, cette expulsion est aussi celle d’un personnage central et indispensable : le bourreau. Il est astreint à une tâche, faire couler le sang des hommes condamnés jusqu’alors sur le papier. Il est le dernier maillon d’une chaîne judiciaire qui n’a pas accordé la possibilité de la rédemption. Le bourreau n’a aucun choix dans sa charge. Il tue, au lieu, de la façon, et à l’heure indiqués par les décisionnaires. Il n’a d’autre alternative que d’être le seul et unique à avoir du sang sur les mains. Le terme de Maître des Hautes et Basses Œuvres définit un certain nombre d’activités en dehors des exécutions. Il est équarisseur, écorcheur de chevaux, vidangeur des basses fosses. Le tout contre l’argent sonnant et trébuchant dépensé par la ville dans laquelle il exerce ses offices. Cette pratique disparaît avec l’avènement de la guillotine.

Toutefois, la croyance populaire selon laquelle le bourreau est un rebouteux perdure longtemps. Il attise de nombreuses convoitises et superstitions. Jusqu’à la fin du XIXe siècle, les épileptiques et les handicapés hantent les lieux d’exécutions dans l’espoir d’atteindre le sang frais de la carotide juste tranchée afin de l’ingérer dans un but curatif. Le bourreau guérisseur est aussi visité – de nuit, sans risque pour le visiteur d’être vu en si mauvaise compagnie – pour ses compétences en matière de fractures. Le bourreau porte symboliquement la marque de l’infamie. C’est un être inquiétant, que l’on hait. Au Moyen-Âge et à l’époque moderne, les bourreaux vivent avec leur famille hors les murs ou dans la maison du Pilori, à Paris. On la trouve près du quartier où sont confinées et exercent les prostituées. C’est ainsi que certains bourrels ont en charge de veiller à la bonne tenue de ces faubourgs. Personne ne veut embaucher ces hommes issus de lignées considérées comme maudites. On est bourreau de père en fils. On naît bourreau. On se marie avec la fille du bourreau de la commune voisine. Personne ne souhaite épouser une femme dont le père guillotine à tour de bras. Ce n’est pas un choix, et lorsqu’exceptionnellement ces jeunes femmes trouvent un époux dans un autre corps de métier, le nouveau gendre embrasse la profession de son beau-père… car chassé de son ancien emploi. On jette des pierres à la progéniture des exécuteurs. L’opprobre est général et ses racines sont anciennes.

On naît donc bourreau, c’est une charge dynastique. Et ces lignées sont ramifiées à travers l’Europe entière. Lors des études sur les familles d’exécuteurs français, on suit leurs parcours en Allemagne, en Belgique et Italie du nord. Ils se recrutent entre eux et tissent des liens matrimoniaux multiples. La famille Sanson remonte au règne de Louis XIV, lorsque Charles Sanson épouse Marguerite Jouënne, fille de bourreau. Leur fils Charles va prendre la suite de son père, apprenant le métier dès ses 15 ans. Il meurt en laissant un fils de 7 ans, Charles-Jean-Baptiste. Celui-ci récupère la charge à sa majorité, épouse une fille de bourreau puis transmet l’office à son propre fils. Il s’agit de Charles-Henri Sanson, le plus célèbre de la lignée. Exécuteur du régicide Damiens ou encore du Chevalier de La Barre, il est le premier à pratiquer la guillotine, en 1792. On estime à 2500 environ les décapitations qu’il a eu à effectuer pendant la période révolutionnaire, dont celle de Louis XVI. De multiples surnoms sont attribués à l’exécuteur des hautes œuvres. Il est le Carnassier, Jean-Cadavre, Jean-Boulgre ou encore Charlot-casse-bras. De ce dernier titre découle directement le néologisme bascule à Charlot, dont la guillotine se trouve affublée dès les premières exécutions révolutionnaires. Henri Sanson exerce dès 1795 en compagnie de son père, puis ce sera le dernier de la lignée, Henri-Clément Sanson, dont un des hauts-faits fut d’avoir gagé la guillotine après avoir été incarcéré pour dettes.

 

Marie Bardiaux-Vaïente

[1] Jean-Marie Carbasse, Histoire du droit pénal et de la justice criminelle, Paris, PUF, coll. « Droit fondamental », 2000.

Le Petit Bourreau de Montfleury

Auteur : Marty Planchais
Édition : Sarbacane,
Année : 2016
Nombre de pages : 56

Alors que le bourreau d’un petit village mène une vie paisible de peintre naturaliste, l’élection d’un nouveau maire bouleverse sa quiétude. Très vite, le bourreau est sommé de faire son travail : exécuter un condamné en place publique !

C’est avec l’apparition d’une réglementation étatique de la peine de mort que des exécuteurs furent désignés de manière attitrée.
Initialement, les bourreaux étaient occasionnels et exerçaient un autre métier. Avec le temps, l’exécuteur public est devenu un officier de justice. Entre 1982 et 1999, Jerry Givens a mis à mort 62 condamnés dans l’état de virginie aux u.s.a. « Je n’ai jamais aimé cela, précise-t-il. Pour moi, à chaque qu’une exécution était annoncée, cela signifiait que j’entrais dans le rôle inverse, je devenais celui qui doit prendre une vie.»

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